- août 5, 2024
- 12:04 pm
On m’a posé une question sur instagram : “Comment désacraliser l’orgasme et dire stop à la course au plaisir ?”
Je voulais répondre rapidement à cette question, sous format vidéo reel mais 90 secondes pour y répondre c’est beaucoup trop court. Notamment parce que la sexualité dans les relations amoureuses est un sujet qui est source de questions, angoisses, frustrations et autres émotions qu’on n’aime pas trop ressentir. Pourtant, il existe un potentiel énorme de connexion et de ressources à (re)découvrir au travers de cette facette relationnelle.
J’ai déjà quelques articles qui traitent de sexualité et notamment dans l’article sur une sexualité épanouie, je vous partageais le fait que la sexualité fait partie des 6 sujets de conflits insolubles du couple.
C’est pourquoi, je prends comme base la question qui m’a été posée sur instagram pour en faire un article. En sachant que, celle-ci est complètement en lien avec beaucoup d’autres propos ou questionnements que je peux retrouver lors des séances de coaching amoureux que je réalise.
Commençons. Si je reprends la question : “Comment désacraliser l’orgasme et dire stop à la course au plaisir ?” il y a plusieurs choses qui me viennent.
La première, c’est l’image qu’on se fait de la sexualité. La seconde qui est inévitablement liée à la première est l’éducation sexuelle qu’on a reçue. Et ensuite, il y a la distinction entre sexe et sexualité.
La différence entre sexe et sexualité
Je vais déjà commencer par différencier sexe et sexualité pour qu’on s’entende sur les termes que j’emploie. Le sexe, à mon sens, correspond à tout ce qui touche à l’anatomie et à la génitalité. Je peux ainsi parler de sexe en parlant de pénis, vulve, clitoris, gland etc.
Quand je parle de sexualité dans le couple, pour moi, c’est bien plus large que la reproduction. C’est bien plus large que des parties génitales qui se frottent l’une à l’autre, c’est un ensemble.
Dans cet ensemble, on retrouve notre capacité à affirmer nos limites, à exprimer nos besoins, à connaître nos désirs. On peut avoir un désintérêt pour le sexe en tant que tel, notamment un désintérêt pour l’acte sexuel, l’acte physique. Et en parallèle s’intéresser à la sexualité. C’est-à-dire qu’une personnes sur le spectre de l’asexualité, pourrait s’intéresser à sa sexualité sans “faire du sexe”, se masturber ou autre. Dans la sexualité, il y a un lien avec l’énergie sexuelle qui est un élan de vie.
La vitalité qui existe dans la sexualité
On peut apparenter notre énergie sexuelle à notre vitalité. Il y a des choses qui éteignent notre vitalité et il y en a d’autres qui la ravivent. C’est quelque chose que j’ai évoqué dans l’article où je parlais de faire renaître le désir dans le couple. Notre énergie sexuelle, on peut la percevoir comme une batterie. Parfois, elle est à plat et on a besoin de venir la recharger. Et parfois cette énergie, elle est tellement pleine et intense qu’on a besoin de l’évacuer.
Il existe ainsi différentes expressions de la sexualité. Cela peut se manifester par le :
- fait de ne pas avoir envie de faire l’amour
- désirer avoir plusieurs amants et amantes
- fait de chercher le plaisir physique
- fait de s’interroger sur son orientation sexuelle ou relationnelle
Bref, la sexualité regroupe plusieurs choses.
Vous vous demandez peut-être le lien avec la question initiale mais il me semblait important de poser cette base là. Parce que quand je parle de prendre soin de la sexualité dans son couple, c’est un tout. Un tout qui ne se résume pas à la génitalité et au moment où on décide de se mettre nu et venir stimuler les parties intimes de chacun et chacune.
On prend soin de la sexualité dans sa relation amoureuse quand en amont on prend soin de l’espace de la relation. Avoir des attentions pour son ou sa partenaire, passer des moments de qualité, être dans une posture de soutien et d’amour contribue à permettre de s’épanouir lors des ébats sexuels.
Sortir de l’injonction au plaisir
Mais si je peux reformuler la demande, il s’agit en fait de la question : “comment faire pour sortir de l’injonction au plaisir ? ”
C’est là où l’éducation sexuelle et l’image qu’on a de la sexualité entrent en jeu.
Les représentations sexuelles
Le sujet de la sexualité reste tout de même assez tabou aujourd’hui. En fonction de votre parcours personnel, vous allez être plus ou moins au fait des techniques qui permettent de stimuler les organes sexuels afin de générer du plaisir physique et de parvenir à l’orgasme.
En général, l’éducation sexuelle qu’on reçoit à l’adolescence est assez sommaire. Si bien que la vision qu’on se construit de la sexualité est alimentée par d’autres domaines. Pour certaines personnes ce sera la pornographie, je précise au passage que la pornographie ne représente pas du tout la réalité de ce qu’est la sexualité et le plaisir. Puis pour d’autres ce sera des livres, des documentaires, des conversations avec d’autres personnes etc.
Il y a une vision de la sexualité qui tend à être de plus en plus déconstruite qui est la sexualité orientée autour du pénis.
Cette vision déjà, elle est hétéronormée et on voit un protocole assez classique de rapport avec sexe oral, pénétration puis éjaculation. Dans beaucoup de couples, plutôt hétérosexuels justement, la sexualité s’arrête à partir du moment où l’éjaculation a lieu.
Revisiter ses représentations et injonctions
C’est là où il existe un premier angle d’approche pour sortir de la course à l’orgasme. Cela va être de revisiter à quoi ressemble la sexualité pour nous.
On peut la voir comme un espace avec plein de tapas. On vient grignoter et picorer parmis les différentes pratiques qu’on aime et qui donnent du plaisir sans pour autant être dans un format entrée, plat, dessert. (Préliminaires, pénétration et éjaculation)
Je pense que c’est important de jeter un œil à toutes les injonctions qu’on a pu recevoir et qu’on peut s’imposer dans la sexualité.
Chez les personnes avec un pénis, il y a la pression d’en avoir un gros, d’être en capacité d’avoir une érection, de la tenir puis de jouir.
Pour les personnes à vulve, il peut y avoir la pression de mouiller, de jouir aussi et parfois c’est même une pression de jouir grâce à la pénétration. Là où on sait que la pénétration n’est pas le moyen le plus fiable pour une personne à vulve d’atteindre l’orgasme.
La sexualité est un espace de vulnérabilité qui est énorme. Il y a beaucoup de peurs qui font que la pression que l’on s’impose nous met dans un certain état d’esprit qui ne permet pas d’accéder au plaisir.
Désacraliser l’orgasme et déterminer ce que l’on désire vivre
Donc si on revisite cet état d’esprit, on peut venir déterminer ce qu’on a envie de vivre au travers de la sexualité dans la relation.
- Qu’est-ce qu’on a envie d’amener dans cet espace ?
- Qu’est-ce qu’on a envie de vivre et ressentir ?
- Quelle est la fonction du sexe dans la relation ?
Et la réponse n’a pas besoin d’être utilitaire. On peut chercher de la connexion, de la réassurance, du lâcher prise. Et en fait quand on sait ce qu’on a envie de ressentir, on change l’objectif. Si le résultat auparavant était d’atteindre l’orgasme, et bien là le résultat c’est de :
- se sentir en phase avec son ou sa partenaire,
- passer un moment de qualité ensemble,
- découvrir de nouvelles sensations etc.
Et surtout si l’objectif n’est plus l’orgasme, on sort de la peur de la peur de gâcher le plaisir de l’autre, du stress de ne pas être à la hauteur, de l’inquiétude d’être perçue comme frigide, de la crainte de stopper le rapport s’il nous fait mal etc.
C’est pourquoi ces choses qu’on a envie de vivre, il me semble important de les dire à son, sa ou ses partenaires sexuels.
Quand on s’exprime, on peut savoir si ce qu’on est en train de vivre est la même chose que la personne en face. C’est facile de rester dans notre propre référentiel et notre vérité là où le film qu’on vit n’est pas forcément le film que la personne en face vit.
Trouver son propre « objectif » de sexualité
Un rapport sexuel n’a pas qu’une seule utilité qui est l’orgasme. C’est pour cela d’ailleurs que j’ai fait la distinction entre sexe et sexualité.
Après, évidemment, ce n’est pas parce que je vous dis de lâcher prise sur cette injonction que c’est facile à faire. C’est précisément pour cela que j’ai envie de vous amener à réfléchir à l’état d’esprit avec lequel vous entrez dans la sexualité.
Si cela génère de la pression et de la frustration, c’est normal de ne plus avoir avoir envie de sexe. Si la sexualité est un énième espace où on a la pression de réussir, alors à terme on peut éprouver du rejet. D’autant plus que si les messages médiatiques que vous percevez sont que le sexe c’est merveilleux et que ce n’est pas votre réalité, évidemment qu’une sexualité non ressourçante amène une baisse de désir et de la distance.
La sexualité peut être un espace où on souffle, on se ressource et on se détend.
Désacraliser l’orgasme et construire sa propre vision de la sexualité
Apprendre à se (re)connecter à soi
Un exercice que vous pouvez faire serait d’écrire à quoi vous aimeriez que votre sexualité ressemble. Cela peut être uniquement le rapport en tant que tel mais aussi, tout ce qu’il se passe en amont pour que vous soyez dans une disposition d’ouverture.
De quoi avez-vous besoin pour être dans une posture d’expansion, de présence et connecté à vos sensations ?
De cette façon vous allez pouvoir sortir du script que vous percevez. D’ailleurs, avant d’écrire ce que vous aimeriez vivre dans la sexualité, vous pouvez déjà lister à quoi ça ressemble pour vous aujourd’hui et qu’est-ce que cela vous évoque.
Si par exemple, vous êtes dans le schéma que j’évoquais de préliminaires, pénétration, éjaculation, vous pouvez écrire ce qui vous plaît là-dedans et ce qui vous plaît moins. Cela peut être manque de spontanéité, ennui, manque de considération, envie d’aventures, de changements etc.
Quand on s’intéresse au plaisir et au sexe, on retrouve beaucoup d’informations et d’exemples qui vont être mécaniques. Quelles positions, comment toucher où embrasser etc.
Apprendre à connaître notre corps et ce qui nous fait du bien, ne se résume pas qu’à savoir quelles sont nos zones érogènes.
Il y a aussi le fait de repérer ce qui vient susciter de l’anxiété ou des pensées négatives. Quand je vous invite à revisiter à quoi pourrait ressembler un rapport sexuel, cela inclut le fait d’avoir la possibilité de dire :
- J’aimerais faire une pause
- Est-ce qu’on peut ralentir ?
- Serre moi dans tes bras
- J’aimerais être stimulé différemment
Revisiter, cela permet de ne pas entrer dans un état de panique lorsque quelque chose sort de l’image mentale d’un rapport parfait qu’on se fait.
Les inquiétudes liées à la sexualité
Quand une personne avec un pénis n’éjacule pas, c’est très fréquent que la personne en face se demande si elle a fait quelque chose de mal. Ce qui peut être intéressant c’est justement de venir normaliser le fait de ne pas avoir d’orgasme à chaque rapport. Notamment en amenant d’autres souhaits dans la sexualité.
Il y a des personnes qui apprennent depuis l’enfance à faire passer les désirs et les besoins des autres avant les leurs. Pour ces personnes, leur dire d’être elle-même, d’exprimer ce qu’elles veulent ou ce qu’elles aiment, c’est extrêmement compliqué puisqu’elles n’ont pas appris à s’écouter.
Que vous fassiez partie de ces personnes ou non, il est possible que vous n’ayez aucune idée de ce que vous avez envie de vivre, ce que vous aimez ou à quoi peut ressembler la sexualité si ce n’est ce que vous vivez actuellement.
Développer son imaginaire sexuel
Dans ce cas là, ce que vous pouvez commencer à faire est de développer votre imaginaire autour de la sexualité. Il existe plein de ressources dans des livres, des podcasts, films et séries qui abordent ces sujets.
L’angle que personnellement j’aime bien, est de prendre soin de son énergie sexuelle sans nécessairement être dans le rapport sexuel. C’est prendre soin de cette énergie en amont pour se connecter à sa vitalité. D’un côté, lister ce qui amène de la joie et de l’énergie dans votre vie et de l’autre, ce qui vous en retire. Je vous invite à écouter l’épisode 4 du podcast, j’en parlais dans celui-ci.
Le sexe au travers des 5 sens
Pour développer l’expérience sexuelle, on peut l’explorer au travers des 5 sens afin d’ajouter un peu plus de surprise et de connexion aux rencontres sexuelles :
- ouïe : choisir une musique pour faire l’amour et amener une ambiance, écouter un film érotique en fond sonore, mettre des bruits de forêts pour une ambiance « cabane » etc.
- odorat : des bougies parfumés, encens, parfum pour les draps, prendre une douche avec un savon spécifique avant
- toucher : se masser mutuellement, prendre une douche ensemble, utiliser des bougies de massage (vient stimuler la chaleur), faire glisser des glaçons sur le corps de l’autre
- goût : utiliser des lubrifiants ou huiles de massage comestibles avec des goûts, venir « manger » des aliments sur l’autre comme de la chantilly, de la pâte à tartiner ou autre
- vue : ambiance tamisée, miroir, jeux d’ombres, regarder votre partenaire se toucher, se regarder dans les yeux pendant la masturbation réciproque, choisir des sous-vêtements séduisant
Le plaisir comme objectif secondaire
Toujours dans les expérimentations, pour sortir justement de cette course au plaisir, cela peut être intéressant dans un premier temps de ne pas chercher le plaisir. De façon pragmatique, on met un minuteur de 15 minutes et durant tout ce temps-là, on ne touche pas les parties génitales et on s’attache à explorer davantage la sensualité et ce qui peut amener du plaisir différemment. On peut d’ailleurs se tourner vers le tantrisme si cela nous parle.
Sortir de la sur-stimulation
Et j’ai envie de terminer avec le fait d’avoir des temps où l’on sort de la sur-stimulation. De nos jours, on est bombardé d’informations et de stimulis. Si bien que notre corps augmente petit à petit sa tolérance et il peut en falloir toujours plus pour ressentir quelque chose.
Le fait de s’accorder des temps sans stimulation, cela peut permettre de venir rééquilibrer la balance. Afin de retrouver la subtilité des différentes saveurs.
On a la chance d’avoir des sex toys qui permettent d’être stimulé efficacement pour le plaisir mais parfois cela crée aussi une incapacité à jouir ou ressentir du plaisir autrement. C’est pour cela que je pense que cela peut être intéressant de parfois revenir à l’essentiel, quitte à ce que ce soit un missionnaire qui nous apparaît comme ennuyeux mais qui nous amène à nous sentir profondément connecté à son ou sa partenaire.
La sexualité peut amener du plaisir et beaucoup d’autres choses. À vous donc de définir ce que vous avez envie de vivre autre que ce fameux plaisir. Cela sera beaucoup plus simple de trouver une réponse adéquate à votre besoin si vous arrivez à le nommer.